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Ça Se Passe Là-Haut est une passerelle qui offre au grand public curieux un accès à la recherche la plus pointue en sciences de l'Univers. Au détour de découvertes quasi quotidiennes, je vous invite à rejoindre les deux infinis, le petit et le grand.

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Des résidus de supernovas observés comme jamais auparavant


L'observation innovante de trois jeunes résidus de supernovas de type Ia utilisant la spectroscopie optique à haute résolution vient de donner des informations précieuses aux astronomes. L'un des trois spécimens indique que la naine blanche progénitrice avait une masse inférieure à la limite de Chandrasekhar, pourtant reconnue comme le seuil pour pouvoir exploser... L'étude est parue dans Physical Review Letters.




Ivo Seitenzahl (University of New South Wales, Australie) et ses collaborateurs ont utilisé une toute nouvelle méthode d'observation qui repose sur l'analyse spectroscopique dans les longueurs d'onde visibles, sur plusieurs milliers de zones d'une image simultanément. C'est grâce au spectromètre à grand champ MUSE qui équipe le Very Large Telescope que les chercheurs ont réussi cette prouesse. Ils parviennent non seulement à identifier plusieurs éléments chimiques clé comme le fer ou le soufre, mais ils mesurent également des décalages spectraux ou des élargissements Doppler, ce qui fournit des valeurs de vitesse de la matière qui est imagée. On obtient ainsi la structure chimique du résidu et à quelle vitesse chaque élément est en train de se mouvoir dans son expansion initiée par la superova.

Les trois résidus de supernova en question sont  SNR 0519, SNR 0509, et N103B, tous les trois situés dans le Grand Nuage de Magellan. Les raies caractéristiques qui sont observées sont des raies d'émission d'états très ionisés comme la raie Fe XIV à 530,3 nm (jaune) (du fer ionisé 13 fois) mais aussi Fe IX (Fe8+) ou S XII (Soufre ionisé 11 fois). Comme la méthode permet de voir différentes couches du résidu, les astronomes l'ont appelée un peu pompeusement "tomographie de résidu de supernova". 
Quoiqu'il en soit, la méthode est puissante car elle offre la possibilité de confronter l'observation des différentes couches et leur vitesse d'expansion avec des modèles d'explosion de supernova de type Ia. 
La vitesse d'expansion des résidus est assez considérable :  2460 ± 100 km s−1 pour SNR 0519, 4370 ± 100 km s−1 pour SNR 0509, et 3290 ± 100 km s−1 pour N103B.
Seitenzahl et ses collaborateurs trouvent de précieuses informations sur SNR 0519 et sur SNR 0509 grâce au fait qu'elles sont quasi de symétrie sphérique. SN 0519 est bien expliquée par une explosion classique d'une naine blanche très proche de la masse de Chandrasekhar (au delà de laquelle les naines blanches sont théoriquement inéluctablement instables): les astrophysiciens trouvent une masse du résidu de 1,4 masses solaires. Mais pour SNR 0509 le constat est un peu différent : l'explosion aurait été très énergétique et la naine blanche aurait eu une masse assez inférieure à la limite au moment de l'explosion : seulement 1 masse solaire. Mais globalement, les données concordent avec les modèles d'évolution même si les modèles surestiment l'élargissement Doppler des raies d'émission de 20 à 40%.

Il faut se rappeler que les modèles théoriques qui décrivent les explosions de naines blanches contiennent encore quelques incertitudes. L'image classique est une naine blanche de moins de 1,44 masses solaires qui vit en couple avec une géante rouge ou une autre naine blanche et qui accapare de la matière de sa compagne jusqu'à dépasser la limite fatidique qui la fait exploser en ne laissant derrière elle rien d'autre qu'un résidu gazeux enrichi en éléments lourds. Ce n'est que récemment qu'est apparue l'idée que des naines blanches en dessous de la limite pouvaient aussi exploser. 
C'est notamment le cas pour une naine blanche de 1 masse solaire qui aurait un coeur faisant 0,85 masses solaires et qui serait constitué à 60% de carbone et 40% d'oxygène, entouré par 0,15 masse solaire d'hélium. Une explosion très énergétique d'une telle étoile devrait produire la combustion de 0,5 masses solaires du coeur formant des éléments du groupe du fer et le restant en des éléments proches du silicium. C'est tout à fait ce qui semble être le cas avec SN 0509.

En outre, une explosion de supernova de type Ia pourrait être initiée à proximité du coeur de l'étoile ou bien à proximité de sa surface et le front de la combustion thermonucléaire peut se propager dans l'étoile de manière supersonique ou subsonique. Ces différents scénarios ont heureusement des signatures différentes sur la composition et la morphologie de la matière qui est éjectée ensuite. Les observations de type "tomographie" pourraient ainsi permettre de tester ces différents modèles.  
Mais la méthode fondée sur la spectroscopie des raies d'émission de l'éjecta n'est exploitable que lorsque le résidu est relativement jeune, moins de quelques milliers d'années (SNR 0519 a 600 ans et SNR 0509 a 400 ans). Au-delà, l'émission visible des éléments ionisés devient trop faible vis-à vis de l'émission du gaz interstellaire.

Maintenant que l'on peut déterminer la nature et la cinétique de différentes couches de matériaux dans les résidus de supernovas, la balle revient dans le camp des théoriciens qui vont devoir recalculer plus finement les raies d'émission qui sont attendues dans le résidu en fonction de la forme de l'explosion et de la combustion nucléaire qui doit induire une onde de choc spécifique, jouant sur la répartition spatio-temporelle des éléments chimiques et surtout de leur degré d'ionisation au sein du résidu gazeux. De beaux efforts en perspectives pour creuser toujours plus loin la compréhension des mécanismes qui sont à l'origine des supernovas de type Ia et de leur diversité potentielle.


Source

Optical Tomography of Chemical Elements Synthesized in Type Ia Supernovae
I. R. Seitenzahl, P. Ghavamian, J. M. Laming, and F. P. A. Vogt
Phys. Rev. Lett. 123, 041101 – (22 July 2019)


Illustration

Images des émissions dans le visible des résidus SNR 0519 (à gauche) et SNR 0509 (à droite) : en vert : le Fe14+  (I. R. Seitenzahl et al.)

http://www.ca-se-passe-la-haut.fr/2019/08/des-residus-de-supernovas-observes.html

Découverte d'un quasar lointain très atypique avec un trou noir énorme


Une équipe d’astrophysiciens européens et japonais vient de publier des résultats d’observation d’un quasar très anormal : situé à seulement 1,6 milliards d’années après le Big Bang, le trou noir supermassif qui l’anime a déjà une masse de 25 milliards de masses solaires tandis que sa galaxie hôte possède très peu de gaz et très peu d’étoiles : 16 fois moins qu’attendu pour une telle masse. Une étude parue dans The Astrophysical Journal.




Ce n’est pas la première fois que l’on trouve un trou noir supermassif (ou plutôt ultramassif) très tôt dans l’histoire cosmique, on se souvient du cas assez dingue de J0100+2802 mis en évidence en 2015 avec ces 12 milliards de masses solaires seulement 800 millions d’années après le Big Bang. Celui d’aujourd’hui est appelé J1639+2824. Son redshift vaut 3.84, ce qui implique que sa lumière a voyagé pendant 12,2 milliards d’années avant d’arriver dans nos télescopes et radiotélescopes. Car les astrophysiciens menés par Malte Schramm (Observatoire Astronomique National du Japon à Mitaka, Tokyo) ont exploité d’un côté le télescope japonais Subaru à Hawaï, muni d’une optique adaptative (dans l’infra-rouge proche), et de l’autre le réseau de de radiotélescopes ALMA au Chili (dans l’infra-rouge lointain) pour étudier la distribution du gaz et des étoiles dans ce quasar étonnant.

La masse du trou noir à l’origine de la forte émission du quasar est donc estimée par les chercheurs à 25 milliards de masses solaires. Or, il existe une relation empirique entre la masse d’un trou noir galactique et la masse de sa galaxie hôte, une relation construite à partir de galaxies « locales ». Mais en appliquant cette relation, les astronomes montrent qu’on devrait trouver une masse stellaire supérieure à 1000 milliards de masses solaires dans J1639+2824. Et le télescope Subaru ne parvient pas à détecter la lumière des étoiles de cette galaxie très active, ce qui fournit une limite supérieure pour la masse d’étoiles présentes : elle serait inférieure à 63 milliards de masses solaires, soit 16 fois moins que ce que prédit la relation théorique.

Les observations de l’émission du CO par ALMA a permis aux chercheurs d’estimer en outre quelle est la masse d’hydrogène moléculaire présente. Ils trouvent une valeur de 4,5 milliards de masses solaires, presque ridicule… Ils en déduisent également la masse dynamique dans un rayon de 450 parsecs autour du trou noir (1500 années-lumière), qui donne 40 milliards de masses solaires. Cela indique que le trou noir à lui seul fait 60% de la masse dynamique… Ces données sur la masse de gaz moléculaire et la masse dynamique obtenues avec ALMA permettent aussi à Schramm et ses collaborateurs d’en déduire la masse en étoiles : le résultat est cohérent mais encore plus contraignant que celui obtenu avec Subaru :  la masse en étoiles serait inférieure à 15 milliards de masses solaires.

Résumons : nous avons un quasar situé très tôt dans l’histoire de l’Univers, 1,6 milliards d’années après le Big Bang, dont le trou noir fait 25 milliards de masses solaires (sachant que les premières étoiles et galaxies apparaissent environ 500 millions d’années après la singularité initiale). En appliquant la relation liant la masse du trou noir et la masse de sa galaxie, on s’attendrait à voir de grandes quantités d’étoiles. Mais elles sont quasi absentes, la masse du trou noir est supérieure à la masse totale des étoiles, et qui plus est, il y a également un fort déficit en gaz moléculaire qui est la matière première des étoiles… du jamais vu.

Le trou noir ultramassif de J1639+2824 possède le plus gros déficit en étoiles et en gaz dans sa galaxie hôte. Et les chercheurs ne comprennent pas bien comment a pu se former un trou noir aussi imposant associé à un environnement aussi « pauvre ». Ils pensent qu’il a dû passer par une phase d’accrétion extrême dans son passé, ce qu’on appelle une accrétion de type « super-Eddington ». C’est la seule explication possible que Schramm et ses collaborateurs proposent pour la formation de ce Gargantua. Une très grande quantité de gaz aurait été absorbée très tôt et très rapidement par le trou noir avec une très grande efficacité, à partir d’une graine de trou noir déjà très massive, lui faisant gagner des milliards de masses solaires très vite. Et l’énorme activité rayonnante concomitante à l’accrétion de matière aurait produit une forte rétroaction qui aurait eu pour effet de « souffler » une grande partie du gaz moléculaire qui aurait dû normalement former des étoiles…

Reste alors le devenir d’une telle galaxie, si on peut toujours l’appeler comme ça. Etant donné que le trou noir est actif, il accrète toujours du gaz. De nouvelles étoiles auront donc toujours autant de mal à s’y former dans le futur. Il est donc probable qu’une telle galaxie conservera plus ou moins son ratio masse de trou noir/masse galactique. Mais alors comment se fait-il qu’on n’observe pas de tels ratios dans les galaxies proches (locales) ? Comment un tel objet a-t-il évolué jusqu’à aujourd’hui ? Probablement en fusionnant à un moment donné avec une « vraie » galaxie pleine d’étoiles et de gaz…



Source

A Catastrophic Failure to Build a Massive Galaxy around a Supermassive Black Hole at z = 3.84
M. Schramm, W. Rujopakarn, J. D. Silverman, T. Nagao, A. Schulze, M. Akiyama, H. Ikeda, K. Ohta, and J. Kotilainen
The Astrophysical Journal, Volume 881, Number 2 (22 august 2019)


Illustrations

1) Image de l'émission du CO de  J1639+2824 par ALMA, le noyau actif est figuré par la croix (Schramm et al.)

2) Graphe de la masse du trou noir en fonction de la masse dynamique de la galaxie hôte pour une population de quasars lointains (échelle logarithmique). J1639+2824 est représenté par les deux carrés rouge (selon que l'on prend la masse stellaire ou la masse dynamique mesurée) (Schramm et al.)

http://www.ca-se-passe-la-haut.fr/2019/08/decouverte-dun-quasar-lointain-tres.html

D'importantes variations de réflectivité sur Vénus affectent sa météo


La réflectivité des nuages de la haute atmosphère de Vénus subit des variations très importantes, c'est ce qu'une équipe d'astrophysiciens vient de montrer grâce à de multiples observations de Vénus effectuées durant plus de 10 ans. La zone absorbante, toujours d'origine inconnue, produit une variation d’albédo qui influe très fortement sur la météo de Vénus. Une étude parue hier dans The Astronomical Journal



Malgré des différences atmosphériques considérables, la météo sur Vénus est dirigée comme sur Terre par le rayonnement solaire qu'elle reçoit. Elle doit donc être fortement affectée par le pouvoir de réflexion de ses couches nuageuses. Vénus est en fait affectée différemment que la Terre. Sur Terre, une grande partie de l'énergie solaire est absorbée par le sol, tandis que sur Vénus, ce sont les épais nuages qui absorbent l'énergie incidente.
Yeon Joo Lee (Zentrum für Astronomie und Astrophysik, Technische Universität Berlin) et ses collaborateurs décrivent les mesures qu'ils ont effectuées, principalement dans le domaine des ultra-violets ainsi que dan le visible avec des données de trois sondes planétaires et un télescope spatial : Akatsuki, Venus Express, MESSENGER et Hubble. 
Les taches sombres absorbantes qui apparaissent au sommet des nuages de Vénus sont connues depuis plusieurs dizaines d'années, en revanche, ce qu'on ne connait pas c'est leur nature exacte et leur origine. Aujourd'hui, ce que Lee et ses collaborateurs parviennent à montrer c'est leur lien avec la variation de réflectivité globale et leur conséquence sur le climat et la météo de Vénus. 
Les planétologues sont à peu près tous convaincus qu'il s'agit de petites particules ressemblant à un aérosol. Les observations en UV et en visible des quatre instruments spatiaux de Venus Express, Akatsuki, MESSENGER et Hubble vont dans le même sens en montrant que ces taches produisent une énorme absorption dans l'ultra-violet. 

Quelle que soit leur composition : chlorure de fer, allotropes de soufre, dioxyde de soufre ou autre ces "absorbants inconnus" comme les appellent les astronomes, semblent bel et bien affecter la météo de Vénus via la forte modification d'albédo qu'ils entraînent, et donc d'apport d'énergie vers l'atmosphère Vénusienne. Entre 2006 et 2017, l'albédo observé à la longueur d'onde de 365 nm a été divisé par 2 avant de revenir à sa valeur antérieure. Cette variation a provoqué une variation de l'apport de chaleur solaire de 25 à 40% aux basses latitudes selon les chercheurs, d'après leurs calculs de transferts radiatifs. 
Les scientifiques font alors lien avec les variations qui ont été observées dans le même temps dans l'activité intense de la haute atmosphère qui montre ce qu'ils appellent une "super-rotation", des vents qui dépassent la vitesse de 320 km/h... C'est ce que leur montrent leurs calculs de circulation atmosphérique globale. 

Qu'est-ce qui produit alors ces grosses variations de réflectivité des couches supérieures atmosphériques, de ces taches d'"absorbant inconnu" ? Est-ce que c'est la lumière UV solaire qui produit des réactions chimiques particulières ? Ou bien des rayons cosmiques qui déclencheraient une nucléation dans les nuages ?  C'est la question que se posent les spécialistes car Lee et ses collègues ont remarqué qu'il existait une coïncidence temporelle entre la variation de l'albédo de Vénus sur une grande échelle de temps et la variation de l'activité solaire, qui affecte naturellement l'intensité UV et le flux de rayons cosmiques.
Mais il y aurait bien aussi une autre solution que mentionnent les auteurs : celle de variations temporelles de l'abondance en dioxyde de soufre des nuages élevés, qui pourraient affecter la formation d'aérosols de H2SO4-H2O, mais dont l'origine reste à trouver... 

Source

Long-term Variations of Venus's 365 nm Albedo Observed by Venus Express, Akatsuki, MESSENGER, and the Hubble Space Telescope
Yeon Joo Lee et al.
The Astronomical Journal, Volume 158, Number 3 (26 august 2019)
https://doi.org/10.3847/1538-3881/ab3120



Illustration

Image composite image de Vénus en UV imagée par la sonde japonaise Akatsuki.  (AKATSUKI ORBITER, BUILT BY INSTITUTE OF SPACE AND ASTRONAUTICAL SCIENCE/JAPAN AEROSPACE EXPLORATION AGENCY)

http://www.ca-se-passe-la-haut.fr/2019/08/dimportantes-variations-de-reflectivite.html

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